Merci de poser la question. C’est vrai que c’est un sujet. Il peut être épineux. Sur le stylisme tout le monde a des choses à dire. C’est une question de sensibilité. Donc en interne ou en externe, y’a toujours des : « j’aurais pas fait comme ça », « je n’aurais pas mis ça avec ça ».
Et la beauté de ces affirmations à l’emporte pièce, c’est qu’elles ne sont jamais vérifiables. Car elles sont des projections hypothétiques auxquelles on laisse le bénéfice du doute.
Comment ça se passe pour composer un look de lancement BG :
- il y a quelques mois, je t’aurais dit : je fais un peu ce que je veux mais je m’impose de faire 3 looks par pièces dont 1 accessible, 1 intermédiaire et 1 avancé. Et ça n’engageait que ma compréhension de la pièce et ma propre projection esthétique.
- aujourd’hui je te dis : j’ai un brief du chef de collection qui me donne son intention, il me donne des pistes, des inspirations, comment il voit la chose. Ben aussi me donne sa vision de la pièce. Ensuite je compose les looks, lui et Ben commentent. Je modifie, on débat, on tient nos positions, on débat encore et puis on finit par trancher et c’est parti. Le but étant d’avoir 1 look qui soit dans l’esprit pur du lancement, 1 look qui soit destiné au haut de la page de vente (donc le produit doit être mis en valeur genre eshop, si c’est un pantalon je propose un haut simple qui peut se rentrer dans le pantalon pour bien apprécier tous les détails, ce n’est pas un look à proprement parler) et 1 look que je module en fonction des deux autres soit plus avancé, soit au contraire plus débutant.
Voilà pour la théorie.
Il faut bien voir qu’on a des lancements tous les mois, voire plus surtout en fin d’année. Donc plus d’un shooting par mois. Avec des mannequins qui changent. Mensurations différentes. Donc on est gourmands en pièces. Très gourmands en pièces qui ne seront pas utilisables pour d’autres shooting à moins d’utiliser le même mannequin (sur les pantalons essentiellement). Donc j’essaie de ne pas trop m’éparpiller. C’est une contrainte.
Et puis, oui bien sûr, parfois les gens qui bossent aux stocks me demandent si je peux pousser telle ou telle pièce. Surtout quand il y a des réassorts en fait. Si c’est pertinent, je le fais, sinon je ne le fais pas. Ça dépend des trois catégories de looks citées plus haut. Si on me demande de pousser le jean Kurabo alors que l’esthétique du lancement est davantage orientée vers du soft tailoring ou du décontracté fluide, je ne le pousserai pas car pas de cohérence avec le lancement. Donc pas d’impératifs, mais des indications. Et c’est bien, parfois de la contrainte peut naître la créativité. Surtout que dans une période comme celle-ci, tu as envie d’aider ton entreprise. Si un produit est en peine et que le fait de le placer (pertinemment et habilement) peut aider, tu le fais.
Et puis après, il y a Ben qui me demande certaines variantes de looks pour son article de lancement car il veut expliquer tel ou tel truc.
En parallèle, j’essaie les looks. Là Michel m’indique souvent que telle ou telle pièce n’est pas disponible pour telle ou telle raison. Je fais des modifs de dernière minute (toujours un plaisir de devoir démonter un look qu’on aime comme il est aha). Michel rassemble les pièces. Il s’occupe des retouches etc. si on reçoit la pièce suffisamment en amont. Une galère en temps de covid aussi mais bon ça fait partie du jeu.
Et on envoie le shooting.
Il faut quand même bien voir qu’on est une des seules marques à proposer autant de looks par produits… Et ça, ça vient du média bien sûr et aussi de notre volonté de parler à chacun, de ne pas rester dans l’entre-soi à proposer du look pour le microcosme parisien, toucher aussi le gars dans sa ville qui veut rester discret mais bien habillé.
Voilà. Tu as, dans les grandes lignes, ma mission en tant que styliste. Ce n’est pas un travail isolé comme tu vois mais le fruit de concertations et d’une réflexion globale.
Et le col cheminée vert, je l’ai et le kiffe. C’est juste pour ça que je le mets aha.
Si t’as d’autres questions, shoote !